mercredi 11 juin 2008

Méduse ...


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Méduse Rondanini. Marbre, copie romaine d'après un original de Phidias qui se trouvait sur le bouclier de l'Athéna Parthénos.

Dans la mythologie grecque, Méduse (en grec ancien Μέδουσα / Médousa, de μέδω / médô, « commander, régner »), appelée aussi Gorgo, est l'une des trois Gorgones (avec Euryale et Sthéno), la seule à être mortelle.

Fille de Phorcys et de Céto, et donc sœur des Grées, elle est une belle jeune fille dont Poséidon s'éprend. Séduite ou violée par le dieu dans un temple dédié à Athéna, elle est punie par la déesse qui la transforme en Gorgone. Ses cheveux deviennent des serpents et désormais son regard pétrifie tous ceux qui le croisent. (Selon certaines versions, c'est Aphrodite qui, jalouse de sa chevelure et de sa beauté, change ses cheveux en serpents.)
Elle est décapitée par le héros Persée car Méduse le lui avait demandé, aidé, selon des sources plus tardives, par Hermès et Athéna. De son sang jaillissent ses deux fils, Chrysaor, père de Géryon, et le cheval ailé Pégase, sur lequel Persée s'enfuit, poursuivi par les autres Gorgones. Après l'avoir utilisée pour pétrifier Atlas, délivrer Andromède et tuer Polydecte qui retenait sa mère prisonnière, Persée offre à Athéna la tête de Méduse, que la déesse fixe sur son bouclier, l'égide.



[...] La Grèce élevait des temples à sa divinité [Bacchus]. Seul, un descendant d'Abas, sorti du même sang, Acrise, le repousse des murs d'Argos ; seul, armé contre le dieu, il refuse de le reconnaître pour le fils de Jupiter ; il refuse également ce nom à Persée, qu'une pluie d'or fit naître du sein de Danaé. Mais bientôt Acrise (telle est la puissance de la vérité) n'éprouve pas moins de regrets d'avoir offensé le dieu que d'avoir méconnu son petit-fils. L'un est déjà reçu dans le céleste séjour ; l'autre, portant la tête d'un monstre fameux, hérissée de serpents, et sa dépouille à la main, fend les plaines de l'air sur ses ailes sifflantes. Vainqueur de la Gorgone, il plane sur les sables de la Libye, lorsque des gouttes de sang tombent de la tête du monstre : la terre les reçoit, les anime, et les change en autant de reptiles divers. Telle est l'origine des serpents qui remplissent et infestent cette contrée. Bientôt, ballotté dans l'espace, il vole au gré des vents contraires, comme un nuage chargé de pluie ; il voit du haut des cieux la terre lointaine, et, dans son vol, il parcourt tout l'univers. Trois fois il voit l'Ourse glacée et les bras du Cancer : il est tour à tour emporté vers l'occident, tantôt vers l'orient. Enfin au déclin du jour, craignant de se confier à la nuit, il arrête son vol sur les côtes de l'Hespérie, dans le royaume d'Atlas ; il demande quelques instants de repos, jusqu'à l'heure où Lucifer ramène les feux de l'Aurore, et l'Aurore le char du Soleil. C'est là que règne le fils de Japet, Atlas, qui surpasse tous les mortels par l'énormité de sa taille : il tient sous ses lois l'extrémité du monde et la mer qui ouvre ses flots aux coursiers du soleil, hors d'haleine, et offre un asile à son char épuisé par les fatigues du jour. Mille troupeaux de brebis et de boeufs errent dans ses campagnes ; son empire n'est point gêné par les limites d'un empire voisin, et ses arbres, ombragés de feuilles qui jettent l'éclat de l'or, portent des pommes d'or suspendues à l'or de leurs rameaux. «Prince, lui dit Persée, si la splendeur d'une illustre naissance peut te toucher, Jupiter est mon père ; si tu as de l'admiration pour les grandes choses, tu pourras admirer celles que j'ai faites : je te demande l'hospitalité et le repos». Atlas gardait le souvenir de ce vieil oracle que Thémis avait rendu sur le Parnasse : «Atlas, un jour viendra où tes arbres seront dépouillés de leur or, et c'est à un fils de Jupiter qu'est réservée la gloire de cette conquête». Effrayé de cet oracle, Atlas avait enfermé ses jardins d'épaisses murailles, un dragon monstrueux veillait à la garde de leur enceinte, et l'accès de ses frontières était interdit à tous les étrangers : «Eloigne-toi, répondit-il ; la gloire de tes prétendus exploits, et Jupiter lui-même ne pourraient te sauver». Il joint la violence aux menaces et veut chasser de son palais le héros qui hésite et mêle dans ses paroles la douceur à la fermeté. Trop faible pour résister (qui pourrait en effet égaler la force d'Atlas ?) : «Puisque tu fais si peu de cas de ma prière, dit-il, reçois ta récompense». Et se détournant à gauche, il lui présente le hideux visage de Méduse. Le colosse est changé en montagne, sa barbe et ses cheveux deviennent des forêts, ses épaules et ses mains des coteaux, sa tête le sommet même de la montagne, ses os des rochers, tout son corps élargi prend un accroissement immense, et désormais (dieux, vous l'avez ainsi voulu) le poids du ciel et de tous les astres repose tout entier sur lui.




Le petit-fils d'Hippotas avait renfermé les vents dans leur prison éternelle, et Lucifer, qui rappelle les hommes au travail, brillait du plus vif éclat à la voûte céleste. Persée reprend ses ailes, les attache à ses pieds, s'arme d'un fer recourbé, et, d'un vol rapide, Sillonne les plaines de l'air. Il a déjà laissé, à gauche et à droite, d'innombrables contrées, lorsqu'il abaisse ses regards sur les peuples d'Ethiopie et sur les champs où règne Céphée. Là, condamnée par l'injuste arrêt de l'implacable Ammon, Andromède expiait le superbe langage de sa mère. Persée voit ses bras enchaînés à un rocher sauvage, et, si le souffle léger des Zéphyrs n'eût pas agité ses cheveux, si des pleurs n'avaient pas coulé de sa paupière tremblante, il l'aurait prise pour un marbre, ouvrage du ciseau. Atteint à son insu d'une flamme nouvelle, il demeure immobile et ravi par les charmes qui frappent ses regards, il oublie presque de frapper l'air de ses ailes. Il s'arrête et s'écrie : «Non tu n'es pas faite pour de pareilles chaînes, mais pour celles qui unissent des amants passionnés. Apprends-moi, de grâce, ton nom, celui de ces contrées, et pourquoi tu portes ces fers». D'abord elle garde le silence : vierge, elle n'ose parler à un homme ; elle eût même caché de ses mains son visage pudique, si elles n'avaient pas été enchaînées ; du moins elle pouvait pleurer : ses yeux se remplirent de larmes ; enfin, de nouveau pressée de parler, et craignant qu'il n'imputât son silence à la honte de quelque crime, elle lui apprit son nom, celui de son pays et le fol orgueil que la beauté avait inspiré à sa mère. Elle n'avait pas tout dit encore ; soudain l'onde retentit, un monstre apparaît sur la vaste surface des eaux ; il s'avance et presse sous ses vastes flancs une mer immense. La jeune fille pousse un cri : son père affligé, sa mère éperdue étaient présents ; malheureux tous les deux, sa mère était la plus coupable ; ils ne lui donnent pour tout secours qu'un juste tribut de larmes et les cris du désespoir ; ils serrent dans leurs bras Andromède attachée au rocher. «Vos pleurs pourront couler à loisir, dit l'étranger ; mais nous n'avons qu'un instant pour la sauver. Si je briguais sa main, moi, Persée, fils de Jupiter et de celle qu'une pluie d'or rendit féconde dans sa prison, moi, Persée, vainqueur de la Gorgone à ta tête hérissée de serpents, moi qui, porté sur des ailes, osai voyager dans les plaines de l'air ; sans doute je serais choisi pour gendre parmi tous mes rivaux. A tant de titres je veux, si les dieux me secondent, ajouter un bienfait : pour qu'elle m'appartienne, je m'engage à la sauver par mon intrépidité». On accepte cette condition ! Qui aurait pu balancer ? On le presse, on lui promet Andromède, pour épouse, et pour dot un royaume. Semblable au navire dont la proue sillonne les ondes quand il cède à l'effort de jeunes matelots dont les bras sont baignés de sueur, le monstre s'avance, repoussant et divisant les flots avec sa poitrine ; la distance qui le sépare du rocher pourrait être franchie par le plomb que lance dans les airs la fronde baléare ; soudain, le héros, frappant la terre de ses pieds, élève son vol jusqu'aux nues ; son ombre se réfléchissait à la surface des eaux ; le monstre voit cette ombre et l'attaque avec fureur. Quand l'oiseau de Jupiter aperçoit dans la plaine un serpent qui présente son dos livide aux rayons du soleil, il l'attaque par derrière, et, pour l'empêcher de retourner contre lui sa gueule cruelle, il enfonce dans les écailles de son cou ses implacables serres : ainsi Persée, traversant l'espace d'une aile rapide, fond sur le dos du monstre frémissant, et lui plonge dans le flanc droit son glaive recourbé, qui pénètre jusqu'à la garde. Le dragon, qu'irrite une large blessure, tantôt s'élève en bondissant dans les airs, tantôt se cache au sein des flots, ou se roule comme le sanglier furieux qui s'agite effraté au milieu d'une meute aboyante. Le héros se dérobe d'une aile agile à ses avides morsures, et partout où elle peut trouver passage, sur son dos hérissé d'écailles arrondies, sur ses flancs ou sur sa queue, qui se termine en dard comme celle d'un poisson, son épée, semblable à une faux, le perce de mille coups. Le monstre vomit de sa gueule les flots de la mer mêlés avec son sang, rouge comme la pourpre, et les fait rejaillir sur les ailes appesanties de Persée ; ses talonnières en sont trempées, et le héros n'osait plus s'y confier, lorsqu'il découvre un rocher dont la cime s'élève au-dessus de la mer tranquille, et disparaît sous les ondes en courroux. Il s'y soutient avec effort, et, saisissant de sa main gauche la pointe du roc qui s'avance, de l'autre il plonge et replonge le fer dans les entrailles du monstre. Le rivage retentit de cris et d'applaudissements qui montent jusqu'aux célestes demeures ; transportés de joie, Cassiope et Céphée, père d'Andromède, saluent Persée du nom de gendre, et le proclament l'appui et le sauveur de leur maison. Délivrée de ses chaînes, Andromède s'avance, Andromède, l'objet et la récompense de cette périlleuse entreprise. Persée lave dans l'onde ses mains victorieuses, et de peur que les cailloux ne blessent la tête aux cheveux de serpents, il couvre la terre d'un lit de feuilles tendres, sur lesquelles il étend des arbustes venus au fond de la mer ; c'est là qu'il dépose la tête de la fille de Phorcus. Ces tiges nouvellement coupées, et dont la sève spongieuse est encore pleine de vie, attirent le venin de la Gorgone, et se durcissent en la touchant ; les rameaux, le feuillage contractent une rouleur qu'ils n'avaient point encore. Les nymphes de la mer essaient de renouveler ce prodige sur d'autres rameaux, et à chaque fois se réjouissent d'y avoir réussi. A diverses reprises, elles en jettent les débris dans les eaux, comme autant de semences. Jusqu'à ce jour, le corail a conservé la même propriété : il se durcit au contact de l'air ; osier flexible sous les ondes, il devient une pierre hors de la mer.



Persée élève à trois dieux trois autels de gazon ; l'un à, gauche, pour Mercure ; l'autre à droite pour toi, chaste déesse des combats, et celui du milieu pour Jupiter. Il immole à minerve une génisse ; au dieu qui porte des ailes, un veau ; à toi, maître des dieux, un taureau. Aussitôt il emmène Andromède, et ne veut qu'elle pour sa dot et pour prix d'un si glorieux exploit. L'hyménée et l'Amour allument leurs flambeaux ; on répand à pleines mains les parfums sur la flamme, on suspend aux portiques des guirlandes de fleurs ; aux sons du luth, de la lyre et de la flûte s'unissent des hymnes joyeux, interprètes de la félicité et de l'allégresse publiques. Les portes du palais s'ouvrent et laissent voir au loin l'or qui décore ses portiques ; l'élite des Céphéens prend place au somptueux banquet préparé par le roi. A la fin du repas, alors qu'un vin généreux anime les esprits et les met en liberté, le fils de Danaé veut connaître les moeurs et les usages de cette contrée ; Lyncides, l'un des convives, s'empresse de lui répondre et de lui conter et ces usages et ces moeurs. Après l'avoir satisfait, il ajoute : «Maintenant, intrépide Persée, dis-nous, je t'en conjure, par quel effort de courage et par quel stratagème ton bras a pu trancher cette tête hérissée de serpents. - Sous les flancs glacés de l'Atlas, répond le petit-fils d'Agénor, il est un lieu protégé par de solides barrières de roc ; à l'entrée habitaient les deux filles de Phorcus ; elles n'avaient qu'un œil, dont elles se servaient tour à tour. Tandis que l'une le remettait à l'autre, je le dérobe par une ruse habile, en substituant furtivement ma main à celle qui devait le recevoir ; alors, par des sentiers cachés, inaccessibles, entrecoupés d'horribles forêts et de rochers énormes, j'arrive à la demeure des Gorgones ; çà et là, dans les champs et sur les routes, j'avais aperçu des figures d'hommes et d'animaux changés en pierres à l'aspect de Méduse. Son visage hideux s'offrit aussi à mes regards, mais réfléchi sur l'airain du bouclier que portait ma main gauche, et tandis qu'un lourd sommeil engourdissait le monstre et ses couleuvres, je séparai sa tête de son cou. Soudain Pégase, qui vole sur des ailes rapides, et Chrysaor, son frère, naquirent du sang de la Gorgone». Persée fait ensuite le récit véridique des périls qui l'ont menacé dans sa longue course ; il leur dit quelles mers, quelles contrées il a vues sous ses pieds du haut des cieux, et quels astres il a effleurés de ses ailes balancées dans les airs. Il se tait cependant plus tôt qu'on ne le désire. Un des convives lui demande pourquoi seule, parmi ses soeurs, elle avait les cheveux entremêlés de serpents. L'hôte de Céphée répond : «Ce que vous me demandez mérite d'être raconté ; apprenez-en la cause. Célèbre par sa beauté, Méduse fut l'objet des voeux de mille prétendants, et la cause de leur rivalité jalouse ; parmi tous ses attraits, ce qui charmait surtout les regards, c'était sa chevelure ; j'ai connu des personnes qui m'ont assuré l'avoir vue. Le souverain des mers profana, dit-on, sa beauté dans un temple de Minerve. La fille de Jupiter détourna les yeux, couvrit de l'égide son chaste visage, et, pour ne pas laisser cet attentat impuni, elle changea les cheveux de la Gorgone en d'horribles serpents ; maintenant même, afin de frapper ses ennemis d'épouvante et d'horreur, elle porte sur l'égide qui couvre son sein les serpents qu'elle fit naître».


Ovide ; Les métamorphoses, IV/611 ...


2 commentaires:

PetitChap a dit…

... hu hu, j'allais dire une connerie ... faire une petite réflexion sur le fait qu'en ce moment, Les métamorphoses d'Ovide servent pour bien des posts ... mais je viens de me rendre compte que le post sur Orphée est un peu plus ancien que je ne le pensais ...

Je vous prie donc de bien vouloir excuser mon esprit taquin ...!!

Ceci dit, je trouve que c'est la grande classe d'avoir des serpents en guise de cheveux : ce n'est pas commun, ça ne passe pas inaperçu, et personne ne vient vous chercher des noises ...! Le bon plan, quoi !!

Anonyme a dit…

... Heuuu ... je crains de n'avoir pas compris l'allusion à ce "bien des posts" ... Si cela ne concernait que ce que j'en publie ici ... en effet, ça ne fait pas "bien des" et de prime, je compte bien en publier quelques autres ... j'adore en effet la mythologie ancienne et tout spécialement la greco-romaine pour ce qu'elle habite encore notre culture et nos traditions, même couverte du pudique voile du christianisme ... Hélas, le christianisme lui, ne nous a jamais offert un tel socle de d'histoires naturelles ... Je vous conterai bien la cène avec Marie-Madeleine, mais c'est d'un tel ennui ... On a peine à imaginer quelques bonnes scènes ...
Veuillez recevoir mes hommages chère petite princesse.