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Cliché, Téva Sylvain
Caractère des naturels
Caractère des naturels
Voici comment on peut décrire la personne physique de ces insulaires en général : les hommes sont grands, fortement membrés et bien faits. Un des plus grands que nous ayons vus mesurait six pieds trois pouces et demi. Les femmes de la classe supérieure sont de la taille des Européennes, mais celles de la classe inférieure sont plus petites. La couleur de la peau n'est pas toujours la même, les insulaires de la classe inférieure, qui sont obligés de s'exposer beaucoup au soleil, sont d'un brun très foncé, et leurs supérieurs, qui passent la plus grande partie de leur temps à l'abri dans leurs maisons, ne sont pas plus bruns que les habitants des Indes occidentales ou les gens qui y ont résidé longtemps ; certaines femmes sont même presque aussi blanches que des Européennes. Ils ont presque tous les cheveux noirs, épais et vigoureux. Les femmes les portent courts et massés en boules autour des oreilles. Les hommes ont diverses manières de les porter ; ceux du premier rang les laissent pousser et quand ils sont longs les attachent quelquefois au sommet de leur tête, d'autres fois ils les laissent pendre et s'étaler sur leurs épaules ; mais la plupart des inférieurs, et ceux que leur métier, par exemple les pêcheurs, oblige à être souvent dans l'eau les portent courts et ramassés comme les femmes. Les hommes arrachent toujours une partie de leur barbe, et tiennent ce qui en reste avec beaucoup de soin et de propreté. Les deux sexes ont l'habitude de s'épiler complètement les aisselles, et nous considèrent comme malpropres parce que nous n'en faisons pas autant.
Cliché, Téva Sylvain
Ils ont tous de belles dents blanches ; la plupart ont le nez épaté et les lèvres épaisses ; leurs traits sont pourtant agréables, leur démarche gracieuse, et leur façon d'être envers les étrangers et entre eux est franche, affable et courtoise, et, autant que j'ai pu en juger, exempte de perfidie, excepté qu'ils volent n'importe qui, et font main basse sur tout ce qu'ils trouvent, avec une dextérité qui ferait honte au plus réputé pickpocket d'Europe. Ils tiennent particulièrement à la propreté, aussi bien sur leur personne que dans leur nourriture ; ils se lavent toujours les mains et la bouche tout de suite avant et après les repas, et se lavent ou se baignent dans de l'eau claire trois fois par jour, le matin, à midi et le soir.
La seule chose qui rende leur voisinage désagréable, c'est l'huile avec laquelle ils oignent leur tête, qu'ils appellent monoï ; c'est de l'huile de coco dans laquelle on a fait infuser quelques herbes ou fleurs aromatiques. Cette huile est habituellement très rance, et ceux qui s'en servent répandent une odeur peu agréable. Ils ont une autre habitude désagréable pour les Européens, qui est de manger leurs poux, et ils sont souvent couverts de vermine. Néanmoins, cette coutume n'est pas générale, je l'ai rarement vu suivre par d'autres que les enfants ou les gens du commun, et je suis convaincu que, s'ils en avaient le moyen, ils se préserveraient comme nous de la vermine ; mais sans peignes, dans un climat chaud, il est à peu près impossible d'y arriver. Il y a quelques très beaux hommes dans ces îles dont la peau est plus blanche que celle d'aucun Européen, mais d'une couleur blême, comme celle du museau d'un cheval blanc. Leurs yeux, leurs sourcils, leurs cheveux et leurs barbes sont blancs aussi. Leur corps est plus ou moins couverts d'une sorte de duvet blanc. Ils ont la vue courte, et leurs yeux coulent très souvent. Ils ont toujours un air malsain, et n'ont ni la vivacité ni l'activité des autres naturels. Je n'en ai pas vu plus de trois ou quatre dans toute l'île et c'étaient des vieillards. Je n'ai pas vu dans toute l'île plus de trois ou quatre personnes de cette espèce ; j'en ai conclu que ces différences de couleur, etc., étaient accidentelles, et n'étaient pas des particularités familiales, car alors ils seraient plus nombreux. Certains habitants de cette île sont affligés d'une sorte de lèpre ou de gale, sur tout le corps. J'ai vu des hommes, des femmes et des enfants - toutefois en petit nombre - atteints de cette maladie au point de ne pas pouvoir marcher. Je crois que c'est une maladie de famille, car j'ai vu des mères et leurs enfants en être atteints en même temps.
Hommes et femmes se peignent le corps ; dans leur langue, on dit tatou. Cela se fait en injectant de la couleur noire sous la peau de telle manière que la trace en est indélébile. Ces tatouages représentent parfois des silhouettes grossières d'hommes, d'oiseaux ou de chiens. Ceux des femmes sont en général simplement des Z sur chaque jointure des doigts de la main et du pied ; les hommes ont quelquefois les mêmes, et les uns et les autres ont aussi des cercles, des croissants, etc., tracés sur les bras et les jambes ; en somme il y a une telle variété dans les modèles figurés que leur nombre et leur place semblent dépendre entièrement de la fantaisie de chaque personne ; mais tous s'accordent pour avoir le derrière entièrement noir : au-dessus, la plupart ont des arcs larges d'un quart de pouce tracés les uns au-dessus des autres, jusqu'aux premières côtes ; ces arcs paraissent être pour eux un sujet de grande fierté, car hommes et femmes prennent grand plaisir à les montrer.
îles Gambier
Je vais maintenant décrire la façon de pratiquer le tatouage : la couleur dont on se sert est du noir de fumée, préparé avec la fumée d'une sorte de noix huileuse dont on se sert comme de chandelle. On introduit cette huile sous la peau par piqûres avec un instrument fait de morceaux d'os ou de coquilles très minces et plats, larges d'un quart de pouce à un pouce et demi et longs d'un pouce et demi. Un des bouts est découpé en dents acérées, et l'autre est fixé à un manche. On trempe ces dents dans le liquide noir, et on les conduit par des coups rapides et nets que l'on donne sur le manche avec une baguette destinée à cet usage, si profondément sous la peau que chaque coup fait un peu saigner. Les surfaces ainsi marquées restent douloureuses quelques jours avant de se cicatriser. Comme cette opération est douloureuse, spécialement le tatouage des fesses, elle n'a lieu qu'une fois dans la vie, et ne se pratique jamais avant l'âge de douze ou quatorze ans.
Description de Tahiti : Deux "canots" de guerre et un de pêcheur ... Derrière, une "Grande Maison", un arbre à pain, des bananiers, des cocotiers et une plante de Taro ...
Dessin de l'expédition ; premier voyage de cook ; 1768-1771 , juin 1769
Le vêtement des insulaires est fait d'étoffes ou de nattes de différentes sortes ; les hommes et les femme sont habillés à peu près de la même façon, c'est-à-dire avec un morceau d'étoffe ou de natte placé autour de 1a taille et qui les enveloppe deux ou trois fois, descend au-dessous des genoux derrière et devant, comme un jupon ; et, quelquefois, deux autres morceaux d'environ deux yards ou deux yards et demi, pourvus d'un trou au milieu par où ils passent la tête ; le morceau d'étoffe est suspendu à leurs épaules, derrière et devant, et attaché autour de leur taille avec une longue bande de tissu fin, et étant ouvert sur les côtés laisse toute liberté à leurs bras. C'est là le costume commun à tous les rangs de leur société, et peu d'entre eux n'en possèdent pas du tout, sauf les enfants, qu'on laisse complètement nus, les garçons jusqu'à six ou sept ans, les filles jusqu'à trois ou quatre. En outre du vêtement que j'ai décrit, quelques-uns des plus élevés en rang, en particulier certaines femmes, ont des façons variées de rouler autour de leur corps plusieurs pièces d'étoffe, chacune longue de huit ou dix yards et large de deux ou trois, si bien que je me suis souvent demandé comment elles le supportaient dans un climat si chaud. Mais, d'autre part, dans la classe inférieure on voit beaucoup de naturels qui, pendant la forte chaleur du jour, sont presque nus, et il y a des femmes qui ne portent rien d'autre que le jupon décrit plus haut, et encore tout juste. Les hommes ont un morceau d'étoffe en forme de sac qu'ils font passer entre leurs cuisses et remontent autour de leur taille Tous les hommes sans exception, y compris ceux du premier rang, peuvent à l'occasion être ainsi vêtus.
Extrait d'une lettre manuscrite de James Cook, 1771
Hommes et femmes ont parfois le visage abrité du soleil par de petits bonnets en feuilles de cocotier. Il y en a que l'on fait avec des nattes fines, mais ils sont moins communs. On porte aussi des turbans, mais le couvre-chef le plus répandu est ce qu'ils appellent tomou ; ce sont des cheveux dont on forme une tresse pas plus grosse que du fil ordinaire. Je puis certifier, sans crainte d'erreur, que j'en ai vu des pièces longues de près d'un mille travaillées d'un bout à l'autre sans un seul nœud. Ce sont les femmes qui les font, et qui en portent. Elles en enroulent quelquefois autour de leur tête cinq ou six pièces, dont l'effet, quand on les dispose avec goût, est très seyant. Comme ornements, on voit des pendants d'oreilles, mais à une seule oreille. On les fait en coquilles, pierre, avec des baies, des pois rouges, ou quelques petites perles que l'on porte attachées par trois. Mais nos boules, boutons, etc., eurent tôt fait de remplacer tout cela.
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James Cook (1728-1779) ; Relation de voyages autour du monde ; premier voyage, 1768-1771
Dessin de James Cook ... [?] : vue ouest du fort ...
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(À suivre ...)
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