jeudi 3 janvier 2008

Les veaux à l'abattoir !!!

Jacques Tardi ; dessin issu de : C'était la guerre des tranchées, Éd. 1993

Militarisme

"Détruis le chien de garde et tu vaincras le maître."

Charles d'Avray


Il nous faut en finir de ce militarisme,
Esclavage imposé, source de crétinisme.
La caserne est le lieu le plus contaminé
Que pour le bien de tous il faut exterminer.
C'est l'immense foyer de la tuberculose,
C'est l'air avarié de quelque maison close,
Depuis le cavalier jusques au fantassin,
C'est la transformation de l'homme en assassin.

Il nous faut en finir de ces traîneurs de sabres,
De ces larbins d'état aux visages macabres,
Galonnés abrutis qui font moralité
De l'acte méprisant de domesticité.
Obéir c'est laisser douter que l'on est homme
Obéir c'est renier son droit d'Etre Autonome,
Obéir c'est se taire ou répondre en bavant,
Obéir c'est enfin n'être pas un vivant.

Soldats, pour nous sauver de tous les parasites
Il vous faut incendier ces casernes maudites,
Ces sources de laquais, de flics et de mouchards,
Ce dépotoir humain qu'engendrent les soudards.
Partout rassemblement ! Artilleurs à vos pièces !
Debout ! Marins debout ! L'oeil sur vos forteresses :
Braquez !.. Chargez !.. Pointez !.. sans crainte de méchefs,
Les gueules des canons sur celles de vos chefs.

Le culte du drapeau regorge d'impostures,
La loque nationale est digne des ordures,
Oublions qu'en un temps, des torchons de couleurs
Traînés sur notre globe ont divisé les coeurs.
Du moindre préjugé que chacun se libère,
Discutons froidement, sans haine, sans colère.
Soldats ! un geste, un seul, peut nous sauver c'est clair,
Mais il dépend de vous : Soldats !... La crosse en l'air !


Charles Henri JEAN dit d'AVRAY, poète et chansonnier anarchiste (1878-1960)








" On creuse un trou ; on s'enterre ; on reste là..."


Sous le fer de Verdun les soldats tiennent.
Pour un endroit que je connais, nous tenons parce que les gendarmes nous empêche de partir. On en a placé des postes jusqu'en pleine bataille, dans les tranchées de soutien, au-dessus du tunnel de Tavannes. Si on veut sortir de là il faut un ticket de sortie. Idiot mais exact ; non pas idiot, terrible. Au début de la bataille, quand quelques corvées de soupe réussissent encore à passer entre les barrages d'artillerie, arrivés là, elles doivent se fouiller les cartouchières et montrer aux gendarmes le ticket signé du capitaine. L'héroïsme du communiqué officiel, il faut ici qu'on le contrôle soigneusement.
Nous pouvons bien dire que si nous restons sur ce chant de bataille, c'est qu'on nous empêche soigneusement de nous en échapper. Enfin, nous y sommes, nous y restons ; alors nous nous battons ? Nous donnons l'impression de farouches attaquants ; en réalité, nous fuyons de tous les côtés. Nous sommes entre la batterie de l'hôpital, petit fortin, et le fort de Vaux, qu'il nous faut reconquérir. Cela dure depuis dix jours. Tous les jours, à la batterie de l'hôpital, entre deux rangées de sacs à terre, on exécute sans jugement au revolver ceux qu'on appelle les déserteurs sur place. On ne peut pas sortir du champ de bataille, alors maintenant on s'y cache. On creuse un trou ; on s'enterre ; on reste là. Si on vous trouve, on vous traîne à la batterie et entre deux rangées de sacs à terre on vous fait sauter la cervelle. Bientôt il va falloir faire accompagner chaque homme par un gendarme. Depuis huit jours, les corvées de soupe ne reviennent plus. Elles se fondent comme du sucre dans du café. Pas un homme n'est retourné,
Ils ont tous été tués, absolument tous, chaque fois, tous les jours sans aucune exception. On n'y vit plus. On a faim. On a soif. On voit là-bas un mort couché par terre, pourri et plein de mouches, mais encore ceinturé de bidons et de boules de pain passées dans un fil de fer. On attend que le bombardement se calme. On rampe jusqu'à lui. On détache de son corps les boules de pain. On prend les bidons pleins. D'autres bidons ont été troués par les balles. Le pain est mou. Il faut seulement couper le morceau qui touchait le corps. Voilà ce qu'on fait tout le jour.
Cela dure depuis vingt-cinq jours.


Jean GIONO ; Recherche de la pureté, 1939.






Au nom du père


Béni soit le Dieu des armées.


Dieu a bénit vos armes.


L'Éternel, ton Dieu, chassera peu à peu ces nations loin de ta face : tu ne pourras pas les exterminer promptement, [...]
L'Éternel, ton Dieu, te les livrera ; et il les mettra complètement en déroute, jusqu'à ce qu'elles soient détruites. Il livrera leurs rois entre tes mains, et tu feras disparaître leurs noms de dessous les cieux ; aucun ne tiendra contre toi, jusqu'à ce que tu les aies détruits.


L'Éternel parla à Moïse, et dit : Venge les enfants d'Israël sur les Madianites [...] Ils avancèrent contre Madian, selon l'ordre que l'Éternel avait donné à Moïse ; et ils tuèrent tous les mâles. [...] Les enfants d'Israël firent prisonnières les femmes des Madianites avec leurs petits enfants et ils pillèrent tout [...] Ils incendièrent toutes les villes qu'ils habitaient et tous leurs enclos. Ils prirent toutes les dépouilles et tout le butin, personnes et bestiaux ; et ils amenèrent les captifs, le butin et les dépouilles à Moïse... [...] Moïse s'irrita [...] Maintenant, tuez tout mâle parmi les petits enfants et tuez toute femme qui a connu un homme en couchant avec lui ; mais laissez en vie pour vous toutes les filles qui n'ont point connu la couche d'un homme.


Samuel dit à Saül [...] écoute ce que dit l'Éternel. [...] Va [...] et tu feras mourir hommes et femmes, enfants et nourrissons, boeufs et brebis, chameaux et ânes.


Ancien Testament. Dieutéronome, 7, 23 et 24 ; édition de Louis Second, 1910.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

une petite chanson pour adoucir les moeurs:

La chanson de Craonne

Quand au bout d'huit jours, le r'pos terminé,
On va r'prendre les tranchées,
Notre place est si utile
Que sans nous on prend la pile.
Mais c'est bien fini, on en a assez,
Personn' ne veut plus marcher,
Et le coeur bien gros, comm' dans un sanglot
On dit adieu aux civ'lots.
Même sans tambour, même sans trompette,
On s'en va là haut en baissant la tête.

R. Adieu la vie, adieu l'amour,
Adieu toutes les femmes.
C'est bien fini, c'est pour toujours,
De cette guerre infâme.
C'est à Craonne, sur le plateau,
Qu'on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C'est nous les sacrifiés !

C'est malheureux d'voir sur les grands boul'vards
Tous ces gros qui font leur foire ;
Si pour eux la vie est rose,
Pour nous c'est pas la mêm' chose.
Au lieu de s'cacher, tous ces embusqués,
F'raient mieux d'monter aux tranchées
Pour défendr' leurs biens, car nous n'avons rien,
Nous autr's, les pauvr's purotins.
Tous les camarades sont enterrés là,
Pour défendr' les biens de ces messieurs-là.

[au Refrain]

Huit jours de tranchées, huit jours de souffrance,
Pourtant on a l'espérance
Que ce soir viendra la r'lève
Que nous attendons sans trêve.
Soudain, dans la nuit et dans le silence,
On voit quelqu'un qui s'avance,
C'est un officier de chasseurs à pied,
Qui vient pour nous remplacer.
Doucement dans l'ombre, sous la pluie qui tombe
Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes.

R. Ceux qu'ont l'pognon, ceux-là r'viendront,
Car c'est pour eux qu'on crève.
Mais c'est fini, car les trouffions
Vont tous se mettre en grève.
Ce s'ra votre tour, messieurs les gros,
De monter sur l'plateau,
Car si vous voulez la guerre,
Payez-la de votre peau !

Anonyme a dit…

...Je donnais, dans mon post du 4 décembre, intitulé : "Promenons-nous dans les bois", une version à peine différente de celle-ci me semble-t-il...
Mais c'est un plaisir que de vous l'entendre répéter chèr(e) Chocolatine !!!
Votre pseudo est adorable à tout point de vue, pour un Ogre, et plus encore...
Bienvenu(e) à vous !!!